Elise Schor, du cabinet Lysias, a défendu devant le Conseil d’Etat la situation de M. B., demandeur d’asile accueilli dans le réseau Welcome. Une décision importante, classée au plus haut niveau d’importance dans la jurisprudence du Conseil d’Etat.
M. B, ressortissant ivoirien a demandé à bénéficier de l’asile, a été admis à séjourner en France ; à ce titre, la préfecture de police lui a délivré un récépissé constatant le dépôt d’une demande d’asile valable jusqu’au 3 novembre 2011. Sa demande d’asile a été rejetée par l’OFPRA le 20 octobre 2011. Dans le délai de recours d’un mois, M. B a déposé une demande d’aide juridictionnelle auprès de la CNDA, dont celle-ci a accusé réception le 1er décembre 2011. M. B s’est rendu à la préfecture de police, le 7 décembre 2011, date à laquelle il avait été convoqué, muni de la preuve de l’enregistrement de sa demande d’aide juridictionnelle, afin d’obtenir le renouvellement de son récépissé ; un refus lui a été opposé au motif qu’il ne justifiait pas, à cette date, du dépôt d’un recours devant la CNDA contre la décision négative de l’OFPRA.
Le Ministère de l’Intérieur, qui avait voulu faire appel d’une ordonnance de référé-liberté enjoignant à la préfecture de munir M. B. d’un récépissé le plaçant en situation régulière et lui donnant accès aux prestations sociales, n’a pu que s’incliner.
Dans cette décision, le Conseil d’Etat rappelle que « le régime d’aide juridictionnelle contribue à la mise en oeuvre du droit constitutionnellement garanti à toute personne à un recours effectif devant une juridiction ». Il souligne que « la présentation, par un demandeur d’asile, avant l’expiration du délai, d’une demande d’aide juridictionnelle devant la CNDA en vue de contester la décision négative de l’OFPRA dont il a fait l’objet, a le caractère d’un recours. » En conclusion, « dans ces conditions, en refusant à M. B, qui justifiait avoir présenté, dans le délai de recours, devant […] la CNDA une demande d’aide juridictionnelle en vue de contester la décision de l’OFPRA […], le renouvellement de son récépissé de demande d’asile au seul motif qu’il n’avait pas encore déposé, à cette date, de recours contre cette décision, le préfet de police a porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale »
Cette décision est importante car la rupture du renouvellement du récépissé emporte des conséquences graves pour les
personnes concernées. Ce que souligne le Conseil d’Etat : « Considérant qu’alors même qu’il résulte des éléments produits par le ministre de l’intérieur qu’instruction a été donnée aux services de ne pas procéder à l’éloignement forcé de M. B tant que la CNDA n’aura pas statué sur son cas, le refus litigieux place ce dernier dans une situation d’urgence caractérisée dans la mesure où il le prive du bénéfice des droits et prestations attachés à la qualité de demandeur d’asile ainsi que des mesures, prévues par la loi, afin de garantir aux demandeurs d’asile des conditions matérielles d’accueil décentes jusqu’à ce qu’il ait été statué sur leur demande. »
Désormais il faudra envisager d’exercer non plus seulement des référés-libertés mais des référés-provisions pour obtenir le paiement direct des allocations auxquelles ont droit les demandeurs d’asile.